À chaque séjour parisien, c’est une tradition, nous faisons le plein d’expos : vous le savez maintenant, non seulement ça nous passionne, mais en plus ça nous nourrit sur le plan professionnel. Lors de notre dernière escapade, on a beaucoup marché, entre le Centre Georges Pompidou et le Jeu de Paume, on a bourlingué entre le Petit Palais et le Musée des Arts Décoratifs. Et justement, ici, on a vu l’expo « Le design pour tous : de Prisunic à Monoprix, une aventure française ». Bon, on va pas vous mentir, on n’a pas été convaincus par la scénographie, mais les contenus, les pièces de design, les sérigraphies, les planches graphiques, ça, c’était drôlement chouette. Et ça l’était d’autant plus qu’on connait bien Jean-Pierre Garrault, l’un des designers de Prisu.
On l’a rencontré pour parler de son travail de designer ; on a eu envie de partager avec vous cet entretien passionnant.
Un artiste complet
Jean-Pierre Garrault est né en 1942. Son environnement familial le prédispose sans doute à orienter sa vie vers la pratique des arts, plutôt les beaux-arts d’ailleurs au départ. Jean-Pierre a le sentiment d’avoir toujours été peintre, depuis sa plus tendre enfance. Vers l’âge de dix ans, il pose le chevalet et la toile à Montmartre, il n’est alors qu’un petit bonhomme mais il inspire le respect des caricaturistes de la place du Tertre : il a déjà une maîtrise assez étonnante pour son âge. Pour sûr, l’art, c’est sa vie !
En grandissant, la peinture ne le quitte pas, même s’il s’oriente vers une école de cinéma, qu’il ne suivra finalement pas. Il voyage, il a soif de connaissance et de découverte.
À 19 ans, il découvre qu’il peut vendre ses dessins pour l’industrie du meuble. L’un de ses copains dirige le bureau d’études chez Roche et Bobois. Jean-Pierre devient designer. Un ans plus tard, le copain quitte Roche et Bobois, Jean-Pierre le remplace. Il occupe ce poste pendant trois ans.
Mais il a soif de liberté. Il est guidé vers l’indépendance.
C’est en 1970 que Prisunic fait appel à ses talents pour créer une gamme de produits innovants, dont le design est aujourd’hui réédité par Monop’.
Jean-Pierre Garrault dans un canapé qu’il a dessiné pour Prisunic. En 1971, il se met en scène, avec sa femme et sa fille, dans leur appartement de Sarcelles pour présenter ses réalisations.
Du design dans une enseigne populaire
Le premier Prisunic ouvre ses portes en 1931, rue de Provence, dans le IXe arrondissement de Paris. Le positionnement est assez simple : proposer au grand public des articles industriels de qualité (vaisselle, ustensiles de cuisine, papeterie etc.) et à des prix abordables. Le succès est immédiat, l’enseigne se développe rapidement. En 1939, juste avant la guerre, il y a déjà près de 60 magasins Prisunic à Paris.
« Le beau au prix du laid », c’est le slogan de Denise Fayolle qui dirige le bureau du style chez Prisunic à partir de 1957. Ça ne vous rappelle pas quelque-chose, à vous ? Mais si bien sûr ! Ce slogan est en fait directement inspiré du livre « La laideur se vend mal » de Raymond Loewy (1953).
Le développement de l’enseigne se poursuit : en 1961, Prisu ouvre son premier département d’esthétique industrielle ; le secteur de la maison est en plein boom.
Le Prisunic de Vaugirard, au début des années 80. Paris XIV.
Ci-dessus, dans une mise en scène imaginée pour le MAD Paris : tapis et tabourets en céramique Jean-Pierre Garault, fauteuil Terence Conran, table basse Danielle Quarante, lampe Marc Held.
Le style Garrault
Il y a deux ans, l’enseigne Monoprix contacte Jean-Pierre Garrault et lui demande : « Est-ce que cela vous intéresse qu’on réédite certaines de vos pièces ? Le MAD Paris souhaite faire une rétrospective sur le design populaire de notre enseigne… ». Jean-Pierre Garrault, qui avait pourtant décidé de se consacrer uniquement à la peinture, se voit accepter, d’autant que la démarche ne consiste pas uniquement à rééditer à l’identique, mais qu’une adaptation actuelle est bienvenue. À sa grande surprise, Jean-Pierre se replonge dans un univers créatif qu’il croyait derrière lui. Ses compositions abstraites, linéaires et géométriques, colorées et très graphiques refont surface dans sa vie d’artiste, il voit son travail de designer vivre une seconde fois.
Nous, on est très admiratifs : participer à une expo au Musée des arts déco de son vivant, c’est la grande classe, non ?
Vous ne trouverez pas ces jolis produits-là chez Arte Diem, et vous croyez peut-être qu’on est un peu fous de vanter des produits de la concurrence… Mais que voulez-vous, on aime partager notre passion et on est altruistes, c’est ainsi !
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