Pour l’été, nous avons invité deux créatrices à créer une expo chez Arte Diem, sur le thème de la nature. La première, Coline Colline, vous la connaissez, elle a déjà exposé chez nous (voir notre article sur le Magazine d’Arte Diem).
La seconde, c’est Carole Charbonnier, artiste photographe.
Ensemble, elles ont monté une exposition sensible, belle et qui fait du bien.
On s’est entretenu avec les deux artistes pour vous livrer ici le fruit de nos échanges et vous donner envie de venir voir leur travail.
Carole Charbonnier
Pourquoi la photo ?
J’ai travaillé longtemps en agence de communication. Dans ce milieu professionnel, l’image occupe une grande place, j’imagine que cette familiarité avec l’outil a influencé mon désir de pratiquer.
Mais mon approche n’a rien à voir évidemment avec les démarches d’agences. J’utilise la photo comme un outil d’expression artistique, je photographie, je collecte, j’accumule des clichés pour en constituer une collection. Ensuite, je recrée avec cette matière d’autres images, plus expressives à mon sens, plus proches de ce que j’ai dans la tête, de ce que j’imagine.
Mais alors, comment opérez-vous ?
J’utilise mes photos que je vais retravailler avec des textures, à l’encre, à la plume, avec des collages, avec d’autres matériels ou à l’aide d’outils numériques.
Quels sont vos sujets de recherches ?
Je pars des choses les plus simples, celles qui nous entourent, qui sont à notre portée immédiate. Souvent dans la photographie on voit du spectaculaire, de l’inaccessible. C’est bien, mais ça reflète un truc qui paraît presque irréel. J’ai toujours déploré qu’on ne s’attarde pas davantage à ce qu’on a sous les yeux : l’incroyable régularité de pétales d’une fleur du jardin, l’apparente simplicité d’un branchage et de ses feuilles, une herbe folle qui s’anime au vent. Je trouve qu’il faut prendre le temps d’observer ce qui est dans notre environnement. Le climat change, des espèces végétales et animales sont menacées, il me semble tellement important de regarder, tant qu’il est temps. Peut-être de laisser une trace de ce monde.
Vous photographiez aussi des oiseaux morts, ce n’est pas un peu bizarre ?
Non, absolument pas, et je ne suis ni dans le morbide, ni dans la provocation. Ça ne m’intéresse pas.
Quand je me balade en forêt, il m’arrive de tomber sur un oiseau mort. C’est triste et beau à la fois. Et ce n’est pas parce que c’est triste que je ne dois pas en conserver une trace. Comme pour les végétaux, j’amène le spectateur à se recentrer sur ce qui l’entoure, à se déconnecter d’une vie de fantasmes où l’on doit tout avoir, aller partout, et surtout dans des endroits dingues et très lointains, alors que là, juste à côté de nous, il y a une multitude de choses que l’on a oublié de regarder. J’aime imaginer que mon travail sert à créer une prise de conscience.
Coline Colline
Vous avez déjà exposé chez Arte Diem des œuvres très inspirées du monde marin, où le dessin venait s’ajouter à un fond de carte marine. Votre prochaine expo va davantage porter sur les plantes, qu’est-ce qui a déclenché ce choix de thématique ?
Plusieurs choses ! D’abord les circonstances, Yannick m’a sollicitée avec cette envie de mettre en place une exposition sur le thème de la nature. Lors de mes études à l’École normale supérieure de Lyon (ENS), j’avais axé une partie de mes recherches sur la représentation des jardins et des plantes, en particulier des plantes à parfum. Plus tard, en tant que conservatrice de musée, j’ai eu l’occasion de travailler sur des projets qui, de nouveau, faisaient appel à ce thème, comme en 2017, avec l’exposition « Jardins » au Grand Palais, sur laquelle j’étais commissaire.
Ça tombait bien, parce que cet univers était resté dans un petit coin de ma tête, et qu’il ne me manquait plus que cette occasion pour relancer la réflexion. J’en suis ravie.
Il s’agit d’une exposition à quatre mains, le travail de Carole Charbonnier vous a-t-il inspiré ?
On a beaucoup échangé avec Carole sur les questions de contenus. Sa démarche de valoriser la beauté des choses les plus simples que l’on a sous les yeux, que l’on oublie de regarder, a été moteur dans mes recherches de planches botaniques. Comme pour l’expo précédente, j’ai choisi de travailler sur des documents d’archives, la planche botanique s’est révélée comme une évidence. J’ai orienté mes recherches sur des planches mettant en scène des végétaux du quotidien, parce qu’il nous semblait important avec Carole que nos deux démarches se rejoignent quelque part. Et j’aime avoir un déclencheur, un cadre. Les échanges avec Carole m’ont apporté cela.
Sur un plan technique, quels ont été vos choix ?
Je travaille directement sur le document d’archive, la planche botanique, à l’encre et à la plume, à la manière des pointillistes. Cette fois-ci, je n’ai pas fait appel à l’aquarelle, parce que les planches botaniques sont déjà colorées. J’ajoute un travail de dessin très minutieux, que certains apparentent à la gravure et qui donne un aspect assez patrimonial. Ce que j’aime dans ce jeu support-surface, c’est qu’il y a à la fois une sorte de contraste qui s’opère entre ce dessin-estampe et l’aspect très contemporain des représentations botaniques, et en même temps que le spectateur soit un peu confus, qu’il ne parvienne plus à dire si l’ajout est le végétal ou l’animal. Ça laisse place à l’imagination, au questionnement.
Quelle représentation avez-vous eu envie d’ajouter aux planches botaniques ?
J’ai bien aimé dans le travail de Carole, ce rapport entre végétaux et animaux, j’aime bien que les deux dialoguent ensemble. Et la représentation animale est une source d’inspiration importante dans mon travail.
Exposition « Botanicus »
Carole Charbonnier, Coline Colline
12 juillet – 30 septembre 2024
Vernissage ouvert à tous le 12 juillet à partir de 18h00 au magasin.
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